PTZ+ : chronique d’un recentrage

Bras armé de la « France des propriétaires » voulue par Nicolas Sarkozy, le Prêt à Taux Zéro + va être largement revu dans le cadre du deuxième plan de rigueur. Pour devenir, avant tout, un dispositif de soutien à la construction de logements neufs.

C’était le 14 septembre 2010. A l’occasion d’une intervention dédiée à la réforme des aides à l’accession à la propriété, Nicolas Sarkozy annonçait un renforcement du Prêt à taux zéro, rebaptisé pour l’occasion PTZ+. L’objectif affiché était alors de faire progresser le taux de propriétaires en France de 58% à 70%, en portant l’effort sur les grandes villes, où le marché de l’immobilier est le plus tendu, et les centre-bourgs, en incitant à l’achat et la rénovation thermique des logements anciens. Les moyens étaient en adéquation avec cet ambitieux programme : une enveloppe annuelle de 2,6 milliards d’euros, et la suppression des conditions de ressources, permettant d’ouvrir le dispositif à toutes les catégories de la population.

Un an plus tard, que reste-t-il du projet de construire une « France de propriétaires » ? Plus grand-chose, a priori. Dans le cadre de l’examen du Budget 2012, l’Assemblée nationale à majorité UMP a en effet voté un amendement qui supprime l’accès au PTZ+ pour l’achat de logements anciens (même en cas de rénovation énergétique) et réintroduit des conditions de ressources. Le PTZ+ universel, victime de son succès, est sacrifié au nom de l’austérité.

Comment en est-on arrivé là ? Il est intéressant de détailler la chronologie de ce recentrage. Premier temps : le 8 novembre dernier, François Fillon annonce que le PTZ+ sera réservé aux logements neufs, et uniquement dans les zones tendues (A et B1). L’objectif est clair : ramener l’enveloppe budgétaire du PTZ à 800 millions l’an prochain, soit une baisse de 70%.

Deuxième temps : avant-hier, l’amendement présenté par le gouvernement maintient finalement le PTZ+ pour les logements anciens « dans lesquels des travaux importants sont réalisés lors de l’acquisition ». Un des objectifs présidentiels initiaux (éviter, dans les petites villes et les bourgs, l’abandon de l’habitat existant au profit de nouvelles constructions contribuant à l’étalement urbain) est conservé. Mais dans la foulée, l’Union des maisons françaises (UMF) réagit vivement à la suppression du dispositif pour le neuf en zone B2 et C, mettant dans la balance les « 100.000 emplois » que pourrait coûter la mesure.

Troisième temps enfin, hier : Gilles Carrez, député UMP et rapporteur général du budget, chamboule totalement l’amendement gouvernemental. Exit le PTZ dans l’ancien rénové, retour dans le dispositif des zones B2 et C mais seulement pour le neuf. Valérie Pécresse, la ministre du Budget, assume le compromis, expliquant qu’elle a été « sensible » à la force des amendements des députés de la majorité. Les constructeurs de maison, eux, ont été entendus et sont forcément « satisfaits ».

Restent les grands perdants de l’histoire : les candidats à la primo-accession, en tout cas la majorité d’entre eux. En 2011 en effet, quatre PTZ sur cinq ont été accordés pour des achats dans l’ancien.

6 réflexions sur « PTZ+ : chronique d’un recentrage »

  1. Quand on sait le nombre de réformes qu’à subi le PTZ depuis sa création… Moi, je ne parviens pas à les compter mais je ne doute pas qu’un historien du PTZ sera en mesure de le faire.

    Lors de chaque réforme, les différents intervenants ont dû investir du temps, de l’énergie… et beaucoup d’argent. Je pense aux établissements bancaires qui le commercialisent mais aussi à la SGFGAS (modification des procédures, évolution des applications informatiques, formation des collaborateurs,…). De quelles économies parlons-nous ?

    Entre le PTZ de 2010 associé à des conditions de ressources, le PTZ+ de 2011 pour tout le monde… et le PTZ– de 2012 (seulement pour les logements neufs et sous conditions de ressources), on est manifestement dans une stratégie que personne ne peut expliquer.

    Attendons la fin des débats parlementaires à l’issue desquels nous aurons peut-être encore d’autres surprises.

    1. Bonjour,

      Ben, en réalité, il n’y a pas eu un grand nombre de réformes « en profondeur » sur le Prêt à Taux Zéro (PTZ).
      Par contre il y a eu des « bricolages » pour en modifier les caractéristiques et conditions d’octroi.

      Si l’on veut faire un historique rapide (et approximatif) des prêts complémentaires en vue du financement du logement principal on pourrait dire :

      =/= Années 1960 : Prêt bonifiés (par l’Etat) distribués par certains réseaux seulement

      =/= Années 1970 : Prêt Immobilier Conventionné P.I.C. (« Déjà une belle usine à gaz !!! »)

      1977 – 1995 : Prêt à l’Accession à la Propriété (PAP) et, en même temps, le Prêt Conventionné (PC) = gouvernement Raymond Barre.

      Pour le PAP, certains réseaux au départ puis extension à d’autres sur adjudication de lots
      Pour le PC tous réseaux qui acceptent une convention avec l’Etat.

      1993 : Création du Prêt à l’Accession Sociale (PAS) = Prêt Conventionné avec conditions de ressources.
      Tous réseaux qui acceptent une convention avec l’Etat.

      1995 – 2010 : Pierre André Périssol (PAP) ministre délégué au logement, crée le Prêt à Taux Zéro = « PAP a tué le PAP !!! ».
      Plusieurs réformettes sur ce PTZ

      2011 – 2011 : Prêt à Taux Zéro Plus = grosse réforme

      2012….???? ! Prêt à Taux Zéro Moins…Autre réforme…!!!…???

      Cordialement

  2. @Aristide : je pense que le surnom de PTZ MOINS va vite être repris dans les médias.

    Sur la mise en place du PTZ+, je pense que l’idée était surtout de faire oublier le très couteux dispositif du crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt.

    On peut d’ailleurs se demander quel est l’intérêt général d’une « France des propriétaires » ? Cela va notamment à l’encontre de la mobilité sur le marché du travail. L’objectif d’avoir une offre de location abondante et accessible me semble plus intéressant…

    1. OK pour la mobilité. La mobilité en France serait même « parmi les plus élevées d’Europe » d’après une étude de 2005.

      Mais je persiste à penser que l’État n’aurait pas du encourager la propriété à tout prix surtout dans une période de prix élevé. Des durées de remboursement de 30 ans, c’est du pouvoir d’achat en moins dans le futur.

      Le seul point positif que j’y trouve, c’est la promotion qui a été faite sur les logements BBC.

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