Sans vouloir paraphraser la chanson bien connue, il faut admettre que les histoires d’amour finissent mal en général, surtout lorsqu’elles sont émaillées de conflits d’origine financière.
Il n’est pas toujours aisé de distinguer les dettes qui restent propres à une personne de celles pour lesquelles les deux conjoints sont considérés comme débiteurs solidaires.
Le législateur a prévu dans ce domaine certains mécanismes de solidarité mais aussi de nombreuses exceptions qu’il est utile de connaître.
Publication initiale le 07/11/2013
Rappelons que la solidarité, au sens juridique du terme, est un dispositif qui permet au créancier de demander, à n’importe lequel des débiteurs solidaires, de payer la totalité de la dette.
Le cas des emprunts
Il peut arriver qu’une personne souscrive seule un emprunt. En cas de défaillance dans les remboursements de celui-ci, le créancier (éventuellement via l’huissier ou la société de recouvrement qui le représente) va tenter de convaincre l’époux ou le partenaire de PACS ou le concubin (qui n’a pas signé le contrat de prêt) qu’il est engagé lui aussi.
C’est de bonne guerre ; chacun sait que deux débiteurs valent mieux qu’un.
Il n’y a pas de solidarité entre époux ni entre personnes liées par un PACS (pacte civil de solidarité) pour les crédits souscrits par l’un d’eux seul, sauf si ces emprunts « portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante ».
Dans le cas où les personnes sont mariées, c’est l’article 220 code civil qui s’applique, quelque soit le régime matrimonial choisi ; dans le cas où elles sont signataires d’un PACS, il faut se référer à l’article 515-4 code civil.
Seul un magistrat est compétent pour apprécier si un emprunt porte « sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante ».
En conséquence, quand le créancier tentera d’obtenir une décision de justice condamnant les deux époux ou les deux partenaires de PACS à régler le solde d’un crédit souscrit par l’un des membres du couple, le magistrat devra analyser la situation particulière de ce foyer (montant des ressources, montant de l’emprunt et affectation de celui-ci,…).
Toute tentative de recouvrement à l’encontre de celui qui n’a pas signé (hors le cas d’une décision judiciaire condamnant les deux personnes) n’est que pure mesure d’intimidation qu’il est prudent d’ignorer même si elle est mise en œuvre par un huissier de justice.
Rappelons si nécessaire, qu’épouser une personne (ou signer avec elle un PACS) ne rend pas débiteur des emprunts souscrits antérieurement par cette personne. On épouse une personne… pas ses dettes (quelle que soit l’origine de celles-ci : crédits, dettes fiscales, sociales ou alimentaires, amendes pénales,…).
Si les personnes ne sont ni mariées ni signataires d’un PACS, il ne peut en aucun cas exister de solidarité entre elles, quelle que soit l’utilisation qui a été faite des fonds prêtés, et même si le compte sur lequel a été viré le montant du prêt (ou celui qui enregistre les remboursements) est un compte joint entre les deux personnes.
En vertu de l’article 1202 du code civil « La solidarité ne se présume point ; il faut qu’elle soit expressément stipulée. Cette règle ne cesse que dans les cas où la solidarité a lieu de plein droit, en vertu d’une disposition de la loi. »
La jurisprudence est ancienne et constante en cette matière.
Voir Cour de Cassation – Civ. 1ère – 27 avril 2004 – n°02-16291,
Cour de cassation – Civ. 1ère – 23 mars 2011 – n°09-71261
Cour de Cassation – Civ. 1ère – 7 novembre 2012 – n°11-25430,
Cour de Cassation – Civ. 1ère – 7 novembre 2012 – n°11-25431
Le cas particuliers des dettes fiscales
La solidarité souvent…
En matière d’impôt sur le revenu, de taxe d’habitation ou d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), la solidarité est de droit entre les personnes mariées ou liées par un pacte civil de solidarité (Art. 1691 bis CGI).
La solidarité en matière d’ISF s’applique même si les biens compris dans l’assiette de cet impôt appartiennent en propre à l’un des époux ou des partenaires pacsés.
Même si un mariage ou un PACS permet de réduire le montant de l’impôt sur le revenu du ménage, dans le cas où les revenus des membres du foyer fiscal présentent de fortes disparités, il ne faut pas perdre de vue que la totalité de cet impôt peut être réclamée à l’un ou à l’autre en cas de défaillance de son époux / partenaire de PACS.
En cas de concubinage notoire, l’assiette de l’ISF est composée de l’ensemble du patrimoine des deux concubins (Art. 885 E CGI). Comme pour toutes les déclarations communes, il y a solidarité en matière de paiement de l’impôt.
En vertu de l’article 515-8 du code civil, « le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple. »
En cas d’absence de déclaration pour l’imposition à l’ISF, c’est à l’administration fiscale qu’il appartient de prouver cette union de fait.
… mais pas toujours
Les époux peuvent être imposés séparément pour l’impôt sur le revenu et pour l’ISF s’ils ont opté pour un régime de séparation de biens et lorsqu’ils ne vivent pas sous le même toit, volontairement ou non (Art. 6 -4 CGI).
Voir également la circulaire 5 B-13-09 – n°44 du 20 avril 2009 relative à la décharge de responsabilité solidaire en cas de divorce ou de séparation.
Les membres d’un couple ni mariés ni pacsés doivent déposer chacun une déclaration de revenus du fait que chacun d’eux constitue un foyer fiscal distinct.
En conséquence, il n’existe pas de solidarité entre ces personnes ; chacune restant débitrice de son propre impôt sur le revenu.
Hors le cas d’un couple marié ou signataire d’un PACS, il n’existe pas de solidarité pour le paiement de la taxe d’habitation, qui est due par l’occupant du bien (propriétaire occupant, titulaire du bail, occupant à titre gratuit,…).
Le principe de solidarité n’existe pas non plus pour la taxe foncière, que les personnes soient mariées, signataires d’un PACS, ou concubins.
Seul le propriétaire du bien est redevable de la taxe. En cas de bien détenu en indivision, « l’obligation de payer la taxe foncière incombant à un propriétaire indivis ne saurait excéder ses droits dans l’indivision, dès lors que la solidarité ne s’attache pas de plein droit à la qualité d’indivisaire » (CAA Douai 17 novembre 2005 – n°03DA00736).